« Vie et mort (subite) de MA garderie »

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Mylène Moisan publiait en fin de semaine « Vie et mort (subite) d’une garderie » (Le Soleil) qui relate l’histoire de Maribelle et Rafael, les propriétaires d’une garderie du secteur Maizerets forcés de fermer leurs portes du jour au lendemain. Comme mes enfants fréquentaient cette garderie, je ne peux m’empêcher de partager mes  réflexions sur cette fermeture. Loin d’être anecdotique, cet événement révèle plusieurs enjeux sur lesquels il serait peut-être bon de réfléchir.

Mme Moisan a fait un bon portrait de la situation dans laquelle sont plongés les propriétaires, les parents et les enfants qui fréquentaient cette garderie. Je ne m’étendrai pas trop sur le côté personnel de l’histoire, car tout parent peut comprendre l’état d’urgence dans lequel on se trouve lorsqu’une propriétaire-éducatrice dévastée vous annonce que sa garderie doit fermer définitivement le lendemain. J’irai plutôt droit au but.

Une histoire d’intégration mise à mort

Maribelle et Rafael sont arrivés de Colombie en 2009. Ils ont appris le français. Ils ont d’abord ouvert leur petite garderie familiale, puis ont décidé de bâtir leur projet. Rafael a suivi une formation en salubrité, le couple a économisé pendant des années pour acheter le quadruplex dans lequel ils louaient leur logement. Éducatrice de formation, Maribelle a mis sur pied son plan éducatif. Leur projet a grandi, et en 2016, ils employaient cinq personnes, toutes issues de l’immigration, toutes hispanophones.J’ai suivi l’intégration de chacune de ces personnes quotidiennement pendant ces années. Plusieurs d’entre elles, à leur embauche, ne connaissaient que quelques mots de français. Au bout de quelques mois, elles soutenaient sans mal la conversation avec les parents. Et oui, Maribelle et Rafael étaient des employeurs, de ceux qui incitent leurs employés à apprendre le français par tous les moyens, les poussant aussi à se perfectionner dans leur domaine en favorisant leur inscription à des formations diverses.Peut-être avez-vous lu comme moi dernièrement les multiples articles au sujet de l’enjeu de l’intégration des immigrants, dont celui-ci, paru dans Le Devoir cette fin de semaine, relatant les propos de la chercheuse Maria Victoria Zunzuneguiqui qui mettait l’accent sur « l’importance de mettre en place des programmes pour favoriser le soutien social et améliorer l’intégration des immigrants ». Et bien pourquoi ne pas commencer par offrir un accompagnement à ces immigrants, qui comme Maribelle et Rafael, doivent se dépêtrer dans ce genre de dédale administratif pour mettre leur projet sur pied ?

Pour une question de normes

Mes enfants ont fréquenté la garderie de Maribelle et Rafael pendant quatre ans. J’ai vu ces propriétaires bâtir leur projet étape par étape, formulaire par formulaire, mise aux normes par mise aux normes. Parce qu’il faut en suivre, des procédures, quand on ouvre une garderie, et encore plus si vous faites les démarches pour obtenir une subvention.Or il semble maintenant que la garderie ne répondait pas aux normes administratives du ministère de la Famille. Je n’en sais pas trop sur le sujet. Mais puisqu’il est question de normes et de procédures, allons-y. Est-ce bien la bonne procédure de tenir en interrogatoire une personne tout l’après-midi pour lui annoncer à 17 h 30 du même jour qu’elle doit cesser immédiatement toute opération ? De menacer les propriétaires de se présenter avec la police pour récupérer les enfants si certains y sont le lendemain ? C’est vraiment la norme de ne communiquer aucune nouvelle du processus d’inspection aux parents pris dans cette histoire ? De n’offrir aucun accompagnement à l’une ou l’autre des parties ? Et finalement, de forcer des employeurs à mettre leurs employés à la rue sans même une journée de préavis ?Nous avons perdu un milieu de garde où mes enfants se sont épanouis. Maribelle et Rafael ont perdu leur projet (et leur gagne-pain), dans lequel ils se sont investi à temps plus que plein pendant sept ans. Et le Québec a laissé passer la chance de favoriser une très belle histoire d’intégration… pour des raisons administratives.

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